Décryptage

L’entrée en vigueur de la norme IFRS 17.

Vers de nouveaux défis pour les sociétés d’assurance et de réassurance

20.10.2022

Dans un environnement économique marqué par l’inflation, une remontée significative des taux et une importante volatilité des marchés financiers, l’entrée en vigueur prochaine de la norme IFRS 17 ne marquera pas la fin des travaux autour de la maitrise de la communication financière.

L’IASB définit les normes comptables internationales IFRS appliquées aux entreprises cotées ou faisant appel à de la dette publique. En remplacement de la norme IFRS 4, IFRS 17 porte sur la comptabilisation des contrats d’assurance et entrera en vigueur le 1er janvier 2023. Elle résulte d’un long processus consultatif débuté en mai 2007 et publié officiellement en mai 2017. Les principaux objectifs de cette norme s’articulent autour d’une représentation économique des passifs et d’une harmonisation des principes comptables, afin d’assurer une meilleure comparabilité et une transparence des entreprises émettrices de contrats d’assurance.

A l’instar de Solvabilité 2, son application présente une évolution réglementaire majeur ayant nécessité des investissements massifs d’implémentation pour les sociétés d’assurance et de réassurance soumises dès la publication de la norme. Ces dernières ont mené en parallèle plusieurs chantiers afin de répondre aux différents défis induits par IFRS 17, notamment la granularité de calcul et de reporting, l’évaluation d’une nouvelle réserve (CSM), la production et l’analyse de nouveaux états financiers dans les délais restreints de la communication financière, ainsi que leur intégration dans un environnement multinormes auquel sont soumis les assureurs. L’ensemble de ces chantiers ont été menés en cohérence avec une stratégie de « tir à blanc » visant à simuler des exercices de production afin d’appréhender et maitriser le processus calculatoire ainsi que les impacts sur les indicateurs financiers, résultat et fonds propres.

Bien que l’entrée en vigueur soit au 1er janvier 2023, l’année 2022 marque les premiers exercices officiels de production. En effet, cette année, encore impactée par la validation des dernières orientations méthodologiques, correspond à la transition de l’ancienne norme IFRS 4 vers IFRS 17. A ce titre, des états financiers IFRS 17 sont à produire afin de servir de comparatif aux publications à venir en 2023.

Les premiers enseignements tirés des productions au titre des « comparatifs » mettent en évidence des faiblesses dans les processus de reporting sur le marché français. Ces limites s’expliquent par la lourdeur de calcul nécessaire à la production des états financiers IFRS 17 dans des délais identiques à ceux de IFRS 4. Ainsi des travaux d’anticipation des calculs sont menés par la plupart des acteurs afin de trouver le parfait équilibre entre simplification, estimation, exactitude des résultats ainsi que délai de production des agrégats IFRS 17.

Concernant les résultats IFRS 17, les premiers éléments produits apparaissent maitrisés notamment avec la stratégie de « tir à blanc » menée pendant les phases projet. Cependant cette maitrise correspond davantage à une compréhension des états financiers qu’à une anticipation. Le contexte économique actuel, combinant forte inflation et remontée des taux ainsi qu’une fluctuation des marchés financiers, pénalise généralement les assureurs sur des périmètres à engagements longs sans qu’une anticipation eut été possible lors de la réalisation des « tirs à blanc ».

Ces premiers constats et enseignements montrent que, malgré l’entrée en vigueur très proche de la norme, des travaux parallèles à la production IFRS 17 vont perdurer sur les prochaines années. Les aspects processus doivent être approfondis afin de définir les méthodologies calculatoires efficientes pour produire le plus rapidement et précisément possible les résultats IFRS 17, tout en assurant une convergence multinorme nécessaire à la justification des comptes sous les différents référentiels. Au-delà de l’aspect méthodologique, des impacts outils et organisationnels sont à prévoir.

De manière complémentaire, les différents acteurs soumis à IFRS 17 vont également approfondir les sujets de communication financière sur les prochains mois et années afin de mieux maîtriser la présentation de leur performance. Les acteurs ont encore beaucoup à faire pour s’approprier cette nouvelle norme dans le processus de pilotage de leur rentabilité et leurs prises de décisions stratégiques, notamment pour maîtriser la volatilité du nouveau référentiel et les contraintes induites par le caractère prospectif de la norme sur leurs latitudes en matière de communication financière. Cela devra commencer par une refonte des indicateurs de pilotage, qui devront être définis sous un cadre IFRS 17, en complément des autres référentiels afin d’enrichir l’analyse et le pilotage sous un prisme multinorme permettant d’allier à la fois les visions rétrospectives, prospectives, rentabilité et risques.

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